Les médias traversent une crise financière qui les oblige à évoluer s’ils ne veulent pas mourir. On peut regrouper les différents moyens que proposent les acteurs médiatiques québécois en 4 grandes stratégies. Québecor est le champion de la première stratégie qui consiste à accroitre la rentabilité par la restructuration de l’entreprise, notamment en favorisant la convergence. Gesca, propriétaire de La Presse, a plutôt choisi de tout miser sur un virage numérique. Alexandre Taillefer, propriétaire de Voir et récent acquéreur de L’Actualité, propose de transformer les moyens traditionnels d’aller chercher des revenus. Finalement, Brian Myles, directeur du Devoir, fait front commun avec la Fédération nationale de communication (FNC), ainsi que Transcontinental (TC) et d’autres encore pour demander d’une voix commune un ensemble d’interventions de l’État afin d’aider les médias à s’adapter et survivre.

Les pertes de revenus publicitaires et d’abonnements ont forcé la vente ou la fermeture de plusieurs médias québécois et la perte de milliers d’emplois. Mais s’agit-il simplement d’un enjeu économique? Bien sûr que non. Les journaux producteurs d’une information d’intérêt public forment le 4e pouvoir toujours essentiel pour notre démocratie.

La crise

Le monde médiatique est en crise depuis plus d’une décennie. Le déploiement de la Toile à l’échelle planétaire a permis à quelques entreprises de devenir des puissances supranationales. On les nomme dorénavant par l’acronyme GAFA (Google, Apple, Facebook, Amazon).  Ces géants forcent les médias de partout à s’adapter à la nouvelle donne technoculturelle. Or, nos médias nationaux d’informations ne font pas exception et sont en péril.

La numérisation de l’information accentuée par le pullulement de gadgets informatiques portables aux mémoires compactes et phénoménales a transformé notre façon de consommer de l’information. Selon un rapport du Pew Research Center, c’est maintenant plus de 90% des Canadiens qui utilisent Internet sur une base quotidienne, et ce chiffre monte à 100% pour les 18-34 ans. Aussi, 67% d’entre nous ont un téléphone intelligent. C’est pourquoi certains géants des technologies deviennent si puissants qu’ils menacent les médias d’information traditionnels.

Certains n’hésitent pas à dire que Google et Facebook sont les pires ennemis des journaux. À eux seuls, ils accaparent 70% des recettes totales des publicités numériques aux États-Unis et 90% de la croissance de ces revenus. Sur une augmentation de 2.7 milliards de dollars entre 2015 et 2016, Google en a obtenu 1.4 milliard, Facebook un milliard, et tous les autres organes médiatiques se sont partagé 300 millions.

Au Canada, selon le rapport du Forum des politiques publiques (FPP) remis en janvier dernier, les deux géants empochent 82% des revenus publicitaires liés à l’actualité accessible en ligne. En 2016, les éditeurs canadiens ne représentaient que 11.5% du marché de l’affichage numérique chez nous. Selon ce même rapport, dirigé par le journaliste Edward Greenspon, les revenus publicitaires des journaux canadiens sont passés de 2.75 milliards à 1.4 milliard de dollars entre 2006 et 2015. Pourtant, pendant la même période, les ventes de publicités numériques sont passées de 562 millions à 4.6 milliards.

Le Projet canadien de recherche sur la concentration des médias de l’Université de Carleton nous apprend qu’en 2015, Google aurait obtenu 2.3 milliards pour ses publicités numériques au Canada, alors que Facebook en aurait eu pour 756 millions. Ensemble, ils ont donc généré 7 fois plus de revenus publicitaires que toutes les autres entreprises médiatiques au Canada. Entre temps, selon une compilation produite par la Guilde canadienne des médias, plus de 16 000 emplois du monde médiatique canadien ont été supprimés entre 2008 et 2015. Et, selon une étude de la FNC, les journaux québécois ont perdu 43% de leurs employés entre 2009 et 2015.

Le rôle des agrégateurs

Le problème est simple, Facebook et Google sont des agrégateurs de contenu. Ils partagent gratuitement, mais sans redevances pour les producteurs du contenu original, l’information que les médias paient cher pour produire. Ce faisant, les agrégateurs attirent incommensurablement plus d’utilisateurs que les éditeurs d’information eux-mêmes, privant donc ces éditeurs de leurs revenus publicitaires.

Effectivement, non seulement Google et Facebook peuvent vendre leurs publicités bien moins cher que les éditeurs de contenu, puisque leur cout de production est bien moindre, mais ils sont même en mesure de les cibler beaucoup plus précisément qu’aucun journal. Selon Edward Greenspon, « ni les médias d’information traditionnels ni une poignée de nouvelles entreprises du numérique à l’échelle d’une ville ou d’un pays n’ont les capacités d’interagir avec les publics comme le font les moteurs de recherche et les réseaux de médias sociaux. » En effet, ces derniers collectent « des filons de données de grand intérêt pour les professionnels du marketing. »

Pour Facebook et Google, c’est nous qui sommes la marchandise. Alors que nous dévoilons notre vie privée sur Facebook et nos intérêts par nos recherches sur Google, ils accumulent une information précieuse pour les entreprises intéressées à faire de la publicité ciblée.

Christian Désîlets, professeur au département d’information et de communication de l’Université Laval, explique dans un mémoire de 2010 qu’avec « les médias modernes, l’information est devenue une commodité, une matière si gratuite et si abondante qu’elle a perdu une grande partie de sa valeur. […] Après avoir longtemps prôné la stratégie de la quantité (concentration des achats publicitaires dans un média pour permettre à son client de dominer ses compétiteurs en termes de présence), les publicitaires prônent désormais la stratégie de la qualité (parler mieux à des consommateurs moins nombreux, mais mieux ciblés). »

En plus de se battre contre les agrégateurs de contenu pour le marché de la publicité, les journaux doivent composer avec l’habitude de la gratuité qui vient avec Internet et rend difficile d’exiger des frais d’abonnement pour plusieurs médias, surtout les médias d’information généralistes.

Selon le rapport du FPP, il se vendait dans les années cinquante plus de journaux qu’il y avait de foyer. En 1995, alors qu’Internet devenait de plus en plus disponible, moins d’un foyer sur deux se procurait un journal. Aujourd’hui, c’est moins de 18% des foyers qui se procurent un journal.

D’autres problèmes

Internet et les réseaux sociaux ont aussi permis le phénomène des blogueurs. Ces gens qui produisent des textes aux apparences journalistiques peuvent mystifier les lecteurs. Et le privilège de ne pas être un journaliste rémunéré, c’est aussi de ne pas avoir de code de déontologie ou de principes journalistiques à respecter. Or, ces pseudo-journalistes représentent un défi pour les journaux, puisqu’ils produisent, gratuitement et sans restriction, des textes ressemblant à ceux des professionnels de l’information, mais ces derniers espèrent bien être payés pour les leurs.

Les nouvelles technologies ont aussi accéléré le rythme de l’information, obligeant la publication toujours plus rapide des contenus. Cette nouvelle donne, additionnée aux difficultés économiques pour les journaux, freine la production d’une information riche et la production d’enquêtes à grand déploiement qui deviennent plus difficiles à rentabiliser.

Selon une étude du Berkman Center for Internet and Society de l’Université Harvard, l’un des principaux enjeux du monde des médias consiste à assurer une information élaborée, spécialisée ou produite par des enquêtes de longue haleine, alors que les médias subissent une pression financière énorme. Ces articles souvent plus couteux sont importants puisque d’intérêt public, mais ils deviennent un choix difficile à faire pour les entreprises de presse qui doivent se serrer la ceinture.

John Cruickshank, l’ancien directeur de CBC News et éditeur du Toronto Star a témoigné au FPP que « les articles de fond, les reportages et les enquêtes étant maintenant plus rares, les programmes d’informations portent de nos jours davantage sur les faits divers et les annonces institutionnelles faites par l’entremise de communiqués et de conférences de presse. »

Il ajoute, de façon pertinente, que « le portrait quotidien de notre vie locale et nationale proposé par les médias de presse canadiens est déjà moins complet, moins nuancé, moins authentique, plus sensationnel, plus scénarisé et plus négatif. Comme la crise de l’industrie s’aggrave, la représentation du Canada par les médias de presse reflète de moins en moins notre réalité collective. »

Histoire récente des médias
En 2017 :
– Transcontinental annonce la mise en vente de ses 93 journaux locaux du Québec et de l’Ontario et 28 journaux dans la région de l’Atlantique.
– La Presse abandonne le papier et coupe 49 postes.En 2016 :
– Rogers Media supprime 87 emplois, dont 60 au Québec, et vend ses trois magazines de langue française, dont L’Actualité qui sera acheté par le groupe financier d’Alexandre Taillefer.
– Transcontinental coupe 117 postes.
– Le Toronto Star élimine 48 postes en raison de l’insuccès de son application pour tablette.
– Québecor abolit 220 postes.

En 2015 :

– Gesca se départit de ses 6 journaux régionaux et ne conserve que La Presse.

En 2014 :

– Quebecor vend ses 175 journaux et publications de la bannière Sun Media.

Et ce n’est pas Facebook qui semble vouloir arranger les choses. Son vice-président du fil d’actualité canadien, Adam Mosseri, a clarifié que « notre activité ne consiste pas à sélectionner les thématiques auxquelles le monde doit s’intéresser. Notre activité consiste à connecter les personnes et les idées, et à fournir aux gens les histoires qui correspondent à leurs attentes. »

Selon le Groupe de travail sur le journalisme et l’avenir de l’information au Québec, sous la direction de Dominique Payette en 2010, la situation se résume au fait que les entreprises achetant de la publicité se désintéressent des entreprises d’information d’intérêt public, car leurs publicités ne rapportent plus assez. Les éditeurs québécois d’informations originales sont en train de perdre la guerre des revenus de la publicité numérique. La survie du quatrième pouvoir est donc menacée.

Première stratégie : la restructuration

Québecor est l’une des premières entreprises médiatiques québécoises à s’être adaptée aux nouvelles réalités technologiques et à leurs impacts sur le marché. Soucieuse de son rendement aux actionnaires, Québecor a innové en proposant un empire québécois basé sur les concepts de concentration et de convergence des médias.

On se souvient de la dernière édition de Star Académie, en 2012, diffusée sur TVA, propriété du conglomérat, accessible bien entendu sur Illico de Vidéotron et couvert abondamment par les journaux, les magazines, les radios et les hebdos du même groupe, tels que le Journal de Montréal. Même les bulletins d’information sur LCN offraient les « nouvelles » concernant l’émission. Puis, ils ont enregistré des albums avec les vedettes de l’émission qu’ils ont vendus chez Archambault, appartenant à Québecor, et des DVD des spectacles étaient offerts au Superclub Vidéotron. On pouvait aussi aller voter sur un site Internet de l’émission, avec des vidéos complémentaires disponibles en ligne à côté de publicités pour l’accès Internet haute vitesse de Vidéotron.

Déjà en 2003, Pierre Karl Péladeau avait affirmé que Québecor avait « décidé de faire contribuer tous nos médias au succès de Star Académie et d’offrir aux deux commanditaires une visibilité exceptionnelle ». Il s’agit en effet d’une stratégie redoutable pour assurer des profits à l’empire médiatique qui contrôle toute la chaine de ses activités.

En 2008, Québecor Média a aussi mis sur pied sa propre agence de presse, l’Agence QMI. Il s’agit d’un instrument des plus rentables pour produire des informations à moindres frais, car les articles non signés de QMI peuvent ensuite nourrir autant le Journal de Montréal, le Journal de Québec que le 24 heures et les sites qui y sont rattachés.

Autre signe d’une volonté de tout contrôler et de ne répondre qu’à soi-même, en 2010, les journaux de Québecor cessent d’être membres du Conseil de presse (CP). Cette organisation chargée de recevoir et d’évaluer les plaintes du public à l’égard des médias québécois avait agacé l’empire de Pierre Karl Péladeau plus d’une fois. Québecor ira même jusqu’à menacer de poursuite judiciaire le CP s’il traite les plaintes concernant ses entreprises.

Dans une même perspective d’efficience, Québecor s’est départi en 2014 de ses 170 journaux Sun Media, de 74 journaux régionaux du Québec et de sa filiale Nurun. Dans son rapport aux actionnaires, on lit que cette restructuration est motivée par « les mutations de notre environnement concurrentiel » et par la nécessité de « se consolider afin de concurrencer les médias numériques ».

La même année, Pierre Dion, alors président et chef de la direction de Québecor, annonce la centralisation de ses activités médiatiques. « Le raffinement de notre modèle d’affaires s’est aussi concrétisé dans la création de Groupe Média, une initiative visant le regroupement de nos activités dans les secteurs de l’information, du divertissement et de la culture […] et destinée à optimiser les synergies pouvant résulter d’une plus grande proximité entre des secteurs aux activités complémentaires ».

Cette stratégie de la convergence semble avoir porté ses fruits. Selon Simon Claus, doctorant en communication et adjoint de recherche au Centre de recherche interuniversitaire sur la communication, l’information et la société, « les médias se voient obligés de composer avec une dilution de l’auditoire, l’explosion de certains usages liés au développement du numérique et d’Internet mobile. Il y a, de plus, la concurrence de grandes multinationales de la communication, symbolisée par la montée en puissance des GAFA. Dès lors, au Canada comme au Québec, certains grands conglomérats disposant d’importants moyens financiers et ayant largement investi dans certains domaines de la communication semblent mieux armés pour répondre à ces évolutions, ce qui génère à terme le risque d’observer des taux de concentration toujours plus exacerbés. »

Quelques critiques

Voilà où le bât blesse. Dans son rapport de 2010, Dominique Payette écrit que de nombreux « rapports admettent les indéniables avantages économiques de la concentration de la propriété des médias. Ils en soulignent aussi les conséquences potentiellement négatives, que ce soit en matière de pluralisme et de diversité des sources d’information, ou que cela entraîne la monopolisation du marché publicitaire et l’uniformisation de l’information fournie aux citoyennes et aux citoyens. »

Une étude conduite en 2013 par le Canadian Media Concentration Research Project concluait d’ailleurs que le Canada a « les plus hauts niveaux d’intégration verticale et de propriété croisée parmi 28 pays étudiés ».

Il n’est pas évident que cette concentration des médias et le fait que leur préoccupation première soit le rendement aux actionnaires coïncident avec la mission des journaux. Pour reprendre les mots de Ken Waddell du Neepawa Banner, la « recherche du rendement rapide et optimal pour les actionnaires détourne trop facilement les entreprises médiatiques de leur mandat en matière de nouvelles et d’information ». C’est aussi ce qu’a témoigné Francis Sonier, président de l’Association de la presse francophone devant le Comité permanent du patrimoine canadien dirigé par la députée libérale, Hedy Fry.

En somme, il semble que la stratégie de la restructuration, visant notamment la concentration et la convergence des entreprises médiatiques, fonctionne bien pour Québecor qui demeure rentable malgré la concurrence féroce de Google et de Facebook sur le plan des revenus publicitaires. Par contre, par la nature même de la concentration des médias, cette stratégie ne peut pas s’appliquer à tous les éditeurs. Il s’agit donc d’une option qui n’est pas généralisable, à moins qu’il ne reste qu’une seule entreprise de presse, ce qui ne serait évidemment pas dans l’intérêt du public.

Deuxième stratégie : le virage numérique.

La guerre médiatique est maintenant numérique. Guy Crevier, ancien directeur de La Presse et le contremaitre de son virage numérique, en a convaincu Power Corporation, le prioritaire de ce qui s’appelle dorénavant La Presse +. Aujourd’hui, plus de 80% des revenus de La Presse proviennent de son application pour tablettes électroniques. Et, non seulement le journal n’est plus imprimé la semaine, mais, depuis le début de l’année, il n’est plus imprimé du tout.

À cet égard, le quotidien montréalais fut très audacieux de devenir le premier journal en Amérique à faire cette transition vers la tablette, en abandonnant l’impression. Bien entendu, cette transition n’aurait pas été possible sans les énormes capitaux disponibles de ses propriétaires, le conglomérat financier de la famille Desmarais.

Il faut dire que, même si les revenus publicitaires ne sont que 71% de ce qu’ils étaient en 2011, avant l’introduction de La Presse+, la coupure de 5 jours d’impression et de la livraison de ces journaux ont aussi diminué les dépenses de 68% à la même époque. Le pari de 40 millions de dollars investis par Gesca dans le projet de La Presse+ semble donc avoir fonctionné. D’autant plus que l’année dernière, l’auditoire de La Presse+ a cru de près de 19%. Si les lecteurs fidèles de La Presse n’ont pas tous fait le plongeon vers la tablette, il semble que cela ait été une occasion pour le quotidien de rajeunir son public et d’aller chercher de nouveaux adeptes par la voie numérique.

Avec une moyenne de 260 000 connexions par jour, un temps d’utilisation moyen dépassant les 40 minutes, un lectorat scolarisé et plutôt aisé financièrement, plusieurs entreprises de produits haut de gamme sont intéressées à s’afficher sur l’application de La Presse. Selon Éric Trottier, vice-président de la salle de rédaction, c’est pourquoi « des entreprises sont prêtes à payer plus de 20 000$ pour une pleine page de notre application, plutôt qu’une cinquantaine de dollars pour une pub sur Facebook. » C’est ainsi que La Presse semble en voie de survivre à la guerre des revenus publicitaires numériques : moins, mais mieux.

C’est ce qui fait dire à Guy Crevier que la principale cause de la crise des médias est due à une gestion trop craintive et conservatrice des entreprises de presse. Selon lui, la plupart des éditeurs traditionnels d’information n’ont pas su s’adapter à la nouvelle donne technologique. Comme le rapporte Edward Greenspon dans son rapport, selon l’ancien PDG de La Presse, « le seul facteur de crise, c’est de vouloir s’en tenir aux anciens modèles de fonctionnement. »

Analyse

Alors que cette stratégie du virage numérique, un pari audacieux, semble avoir valu le cout pour La Presse, peut-il s’agir encore une fois d’une solution généralisable? Les gens du Toronto Star en auraient surement beaucoup à dire sur le sujet. En 2015, ils ont lancé Star Touch, une application semblable à La Presse+, avec un investissement de 25 millions de dollars. Alors qu’ils espéraient au départ rejoindre les 200 000 téléchargements, ils ont stagné aux environs de 60 000.

Il est difficile de savoir pourquoi Star Touch n’a pas eu le même succès que La Presse+, mais il semble évident que l’abandon de l’impression du quotidien les jours de semaine y est pour quelque chose. Le Toronto Star n’a pas voulu prendre ce risque.

En juin dernier, Torstar Corporation a annoncé la fin de Star Touch et la suppression de 30 emplois.

Il faut dire aussi que les ventes de tablettes électroniques ne semblent plus en croissance aussi rapide qu’au moment de la sortie de l’application de La Presse. Selon une étude du groupe de recherche de l’International Data Corporation, en 2016 les ventes de tablettes ont chuté de plus de 16% à l’échelle mondiale. Pour le dernier trimestre de 2016, la baisse s’est accentuée à 20%, et il s’agissait de la neuvième baisse trimestrielle consécutive.

D’autre part, l’apparent succès de l’entreprise de Gesca n’est pas si évident. La salle de rédaction de La Presse a déjà regroupé plus de 400 journalistes et elle n’en compte plus que 210 en ce moment. En septembre 2015, 158 emplois ont été perdus à La Presse, 12 autres en décembre 2016, puis 49 en juin dernier. Et selon Éric Trottier, il faut prévoir une autre vague de mises à pied d’ici deux ou trois ans.

Aussi, alors que Guy Crevier était content avant de partir que les bénéfices de La Presse+ soient en hausse, il ne faut pas oublier que Power Corporation a annoncé une perte cumulée de 309 millions de dollars depuis cinq ans pour sa filiale Groupe de communications Square Victoria, à qui appartient La Presse+, et une perte de 29 millions seulement pour le dernier trimestre de cette année.

C’est aussi parce que Gesca a misé sur le virage numérique qu’il s’est départi de ses 6 autres quotidiens, récemment acquis par l’ancien ministre libéral, Martin Cauchon.

Troisième stratégie : un nouveau mode de financement

Historiquement, les journaux se sont financés par les abonnements et par la publicité. L’habitude de la gratuité et la surabondance virtuelle de l’information rendent la première méthode difficile, et les agrégateurs de contenu rendent la deuxième aussi pénible. Il faut donc trouver de nouvelles méthodes pour se financer.

Le Devoir, avec Brian Myles, a connu un certain succès avec sa campagne Les amis du Devoir. Plusieurs personnalités publiques ont embarqué dans une campagne de pub visant à obtenir des dons. Après la première phase de la démarche qui devait recueillir 1000$ par année, pendant trois ans, auprès de 200 généreux donateurs, la campagne vise maintenant à faire connaitre ce journal indépendant fondé en 1910, et ainsi augmenter le nombre d’abonnements.

Cela dit, le manque à gagner pour Le Devoir en 2015 s’élevait à plus d’un demi-million de dollars, et son chiffre d’affaires était en baisse de plus de 800 000$, faisant suite à une baisse de 5% de son chiffre d’affaires en 2014. Il est peu probable que les dons sauvent le journal à moyen ou à long terme.

C’est aussi en 2015 que Le Devoir a mis en place un mur payant sur son site Internet. Les lecteurs ne peuvent plus lire qu’une dizaine d’articles par mois avant qu’on les incite à s’abonner pour en lire plus. Le Journal de Montréal avait aussi tenté un mur payant, mais l’a abandonné, jugeant que la compétition des sites entièrement gratuits de Radio-Canada et de La Presse est trop forte. Il faut aussi dire que la publicité numérique devient de plus en plus lucrative et qu’elle dépend pour cela d’un nombre de clics que les murs payants ne compensent pas en abonnements.

Une autre avenue de financement requiert qu’un fournisseur de services mobiles ou d’Internet résidentiel offre à ses clients un ensemble d’abonnements à divers médias. Au Canada, Rogers le fait à petite échelle en offrant Texture, son application qui propose des forfaits abordables donnant accès à près de 200 magazines en version numérique. Les redevances sont ensuite partagées par les médias en question.

En France, le géant de la distribution de services mobiles, d’Internet et de télévision résidentielle, SFR, offre avec plusieurs de ses forfaits un abonnement à SFR Presse. De la même façon, pour moins d’une vingtaine d’euros, les utilisateurs ont accès à une soixantaine de titres de presse, incluant Figaro, Libération, et Paris Match. En 2016, SFR Presse comptait plus de 300 000 abonnés.

Bien entendu, une entreprise de presse à elle seule ne peut pas décider d’une telle initiative de regroupement d’abonnements. Néanmoins, pour un joueur semblable à SFR tel que Vidéotron, la chose serait possible. Il s’agirait d’une valeur ajoutée à leurs forfaits, d’un rabais important pour les lecteurs de quotidiens, d’hebdos et de magazines, mais aussi d’un revenu supplémentaire pour tous ces médias. D’autant plus que Vidéotron est propriétaire de plusieurs des médias qui pourraient être offerts.

Finalement, un nouveau joueur du monde des médias québécois tente de transformer la façon de faire des revenus publicitaires. Il s’agit d’Alexandre Taillefer, par le biais de sa compagnie XPNP Capital. Il s’est porté acquéreur du journal Voir en 2015, puis du magazine L’Actualité l’année dernière.

L’homme d’affaires était particulièrement intéressé par La Boutique Voir, car elle permet au journal de vendre des publicités contre des bons d’échange. Le modèle est simple, mais original: les entreprises locales qui désirent acheter de la publicité dans le Voir peuvent le faire contre des chèques cadeaux ou des produits que le journal pourra ensuite revendre à sa clientèle par le biais de la boutique qui devient un moyen de les monétiser. En somme, le journal garantit un retour sur les investissements aux entreprises qui achètent de la publicité, et le Voir s’assure des revenus en revendant ces bons d’achats sur sa boutique en ligne.

« Par contrats échanges, on entend un marchand qui veut présenter de la publicité dans un magazine, mais plutôt que de la payer en argent, souhaite le faire avec de la marchandise ou des services, explique Alexandre Taillefer. Le consommateur qui achète une offre doit retourner dans le commerce du marchand pour en profiter. Le marchand peut donc suivre directement le rendement d’investissement. »

Il entend exporter ce concept qui selon lui a réussi à freiner la perte de revenus pour Communication Voir. Il a donc créé Média Boutique, un service clé en main de boutique en ligne pour vendre les produits et services échangés contre de la publicité dans les médias, en collaboration avec nul autre que Guy Laliberté, créateur du Cirque du Soleil, depuis novembre 2016. Le même mois, ils ont d’ailleurs signé une entente avec le Groupe V Média, propriétaire de la chaine de télévision V.

Selon Hughes Mailhot, le coprésident de Média Boutique, « on assiste à l’érosion du quatrième pouvoir, ça crève les yeux. Notre mission, c’est de redonner le pouvoir financier aux médias. Notre rêve, c’est d’être un contrepoids à Facebook et Google. »

Il est trop tôt pour savoir si cette entreprise sera couronnée de succès, mais XPND Capital songe déjà à accroitre la présence de ses boutiques sur les appareils mobiles et permettre aux utilisateurs d’acheter directement à partir d’une application.

Quatrième stratégie : l’intervention de l’État

En mai 2016, la FNC a invité 120 acteurs québécois du monde des communications pour un colloque sur le thème de la crise des médias. Le regroupement syndical qui représente 6000 membres affiliés à la CSN a réussi à réunir Sylvie Cerasi de TC, Claude Gagnon du Groupe Capitales Médias, Michel Cormier de Radio-Canada, Éric Trottier de La Presse et Brian Myles du Devoir, pour une table ronde où il a notamment été question d’aide financière par l’État.

En septembre de la même année, une coalition a vu le jour afin de demander l’aide de l’État par diverses propositions. La Coalition pour la pérennité de la presse d’information au Québec regroupe 137 hebdomadaires et 9 quotidiens dont notamment Le Devoir, le Groupe Capitales Médias, Hebdos Québec et TC.

L’un des arguments avancés par la coalition pour justifier l’intervention de l’État est qu’en réalité le journalisme est une exception culturelle, selon les mots de Brian Myles. Les productions cinématographiques et télévisuelles jouissent déjà de subventions depuis de nombreuses années parce qu’elles permettent un épanouissement culturel du Québec. Et selon Brian Myles, le journalisme est « vital à la sauvegarde d’une diversité médiatique, à l’enrichissement des débats et au soutien des communautés de lecteurs dans leur quotidien. »

« Tout le problème est là. Au Québec, l’industrie culturelle et la création artistique ont pu prospérer grâce à un soutien étatique constant, de la création des écoles des beaux-arts dans les années 1920 jusqu’à la création du Conseil des arts et des lettres du Québec en 1994. Il ne pouvait en être autrement pour assurer l’affirmation du caractère francophone du Québec, affirme le directeur du Devoir. » Il faudrait selon lui reconnaitre qu’il en va de même du monde journalistique.

En réalité, il ne s’agit pas tellement de sauver des entreprises, ni même l’industrie des médias en général, mais de sauver le 4e pouvoir, de préserver la fonction essentielle de la presse. Selon Aldo Cardoso, consultant mandaté en France pour repenser l’aide publique à la presse, « l’information politique et la presse permettent aux citoyens de participer à la vie publique, pour autant que les titres respectent les termes d’un engagement déontologique. Elles sont au fondement de la démocratie et cette situation justifie le principe d’une intervention publique. »

Le Québec fait d’ailleurs pâle figure en matière d’aide à la presse. Selon la FNC, « les journaux québécois reçoivent annuellement l’équivalent de 3 $ par habitant. Comparativement, au Royaume-Uni, on parle de 18 $ par habitant et de 30 $ en France. Pour la Norvège, on parle de 57 $ et en Finlande, on parle de 92 $ ».

Selon eux, des investissements supplémentaires pour venir en aide aux médias pourraient rapporter plus qu’ils n’en coutent. La FNC juge donc que les 24 millions sur 5 ans offerts dans le dernier budget provincial pour aider l’ensemble des journaux québécois à faire le virage numérique ne sont pas suffisants. « Cette crise structurelle menace des centaines d’emplois qui génèrent d’importantes recettes fiscales vraisemblablement plus élevées que l’aide timide qui vient tout juste d’être accordée dans le cadre de ce budget. »

Cela dit, le FPP a aussi recueilli des voix discordantes à l’égard de ce genre d’aide financière, celles des petits joueurs des médias numériques. Jesse Brown, journaliste et auteur du podcast Canadaland, aurait déclaré : « cher gouvernement, laissez-moi tranquille pour que je puisse continuer à vous importuner en toute indépendance. Lorsque vous financez mes concurrents, vous me mettez en danger. »

Éric Trottier aussi ne se cache pas d’avoir des réserves concernant l’aide financière de l’État, d’autant plus que le virage numérique de La Presse est déjà effectué. En marge du congrès sur l’information, Le 4e pouvoir sous pression, il aurait dit qu’il a « des réserves par rapport à une aide aux médias d’information pour toutes sortes de raisons. Cette éventualité pose la question de l’indépendance de la presse. Ce n’est pas toujours facile d’être lié à un gouvernement. […] Je ne sais pas si ça me tente d’avoir ce genre de problème. »

Pourtant, M. Trottier n’hésite pas à dire que sa salle de rédaction conserve une entière indépendance et impartialité malgré qu’elle soit la propriété de la famille Desmarais depuis des lustres, et il a probablement raison. La déontologie journalistique ne permet pas qu’une nouvelle soit littéralement commandée par qui que ce soit. C’est l’intérêt public auquel la presse doit obéir.

C’est en ce sens que le rapport Payette, en 2010, recommandait de « lier cette aide publique au respect uniforme des règles déontologiques par des journalistes professionnels et les entreprises qui les emploient. Sans ce lien, l’aide publique n’a plus de sens. Ce sont les pratiques professionnelles éthiques que l’État doit soutenir, leur développement et leur généralisation. » Ce faisant, on respecte le droit du public à l’information en protégeant l’industrie de la presse, tout en préservant l’indépendance des journalistes tenus par des règles déontologiques.

Les propositions

Les recommandations de la Coalition pour la pérennité de la presse d’information au Québec sont au nombre de 6 :

– Un crédit d’impôt de 40% pour les couts de production de l’information, les salaires des journalistes par exemple, permettrait selon eux d’engager davantage de journalistes et de regarnir les salles de presse.

– Un crédit d’impôt de 50% sur les investissements numériques, pour 5 ans, pourrait aider les entreprises d’information à se moderniser et à rattraper la cadence imposée par les GAFA.

– La coalition réclame également d’abroger la Loi 88 qui oblige les journaux à contribuer aux couts de récupération du papier pour les municipalités. Cette taxe sur le recyclage a augmenté de 8$ à 94$ la tonne de papier entre 2006 et 2016. Elle est donc devenue une dépense importante pour les entreprises de presse.

– Le regroupement propose aussi l’abolition de la TVQ et de la TPS sur les journaux, comme pour les livres.

– La coalition demande aussi le rejet du projet de loi 122 qui prévoit la fin de l’obligation pour les municipalités de publier les avis publics dans les journaux.

– Elle demande finalement l’augmentation de la part d’investissements publicitaires du gouvernement dans les journaux, d’autant plus que ces sommes ont diminué, par exemple, de 80% pour les journaux communautaires de la Saskatchewan entre 2009 et 2015.

Évidemment, l’ensemble de ces propositions, si elles devaient être acceptées par nos gouvernements, impliquerait de nouvelles dépenses et des pertes de revenus importantes pour l’État. Or, autant le rapport du FPP que celui du comité parlementaire dirigé par Hedy Fry recommandent d’imposer de nouvelles taxes afin de venir en aide aux médias.

Toutefois, le comité formé de 9 députés fédéraux n’était pas unanime concernant la proposition de taxer de 5% l’accès à Internet haute-vitesse. Les trois députés du Parti conservateur ont produit un rapport dissident, par opposition à cette taxe inspirée des câblodistributeurs qui doivent verser 5% de leurs revenus à un fonds pour la programmation télévisuelle canadienne.

De toute façon, la réponse libérale n’a pas tardé.  Mélanie Joly, la ministre fédérale du Patrimoine canadien, a rapidement répondu que « nous n’introduirons pas de nouvelle taxe sur la distribution de l’Internet. » En effet, le gouvernement Trudeau a présenté l’automne dernier une révision de ses politiques culturelles, mais il n’y figurait aucune taxe de la sorte, présumément pour ne pas aller à l’encontre de sa promesse de faciliter les finances des familles de la classe moyenne.

Toutefois, le Comité permanent du patrimoine canadien a aussi recommandé « d’uniformiser les règles du jeu pour toutes les plateformes afin que les agrégateurs de nouvelles étrangers soient assujettis au même traitement fiscal que les fournisseurs canadiens. » Proposition que le rapport Greenspon présentait aussi.

« L’idée [est] que Google et Facebook puissent contribuer au financement de la production journalistique, de la même manière que les sociétés du câble contribuent au financement des programmes télévisés. Suivant ce raisonnement, à l’instar des câblodistributeurs, ces plateformes tirent un avantage disproportionné de la distribution de contenu produit par des tiers. Par ailleurs, non seulement ces géants étrangers s’emparent de l’argent du Canada, mais en outre, ils ne paient pas d’impôts chez nous, peut-on lire dans le rapport Le miroir éclaté. »

Par contre, comme l’explique Edward Greenspon, les GAFA n’ont pas un monopole au même titre que les câblodistributeurs, et les éditeurs journalistiques ne sont pas obligés d’utiliser les services de Google ou de Facebook, comme c’est le cas pour les diffuseurs télévisuels envers les câblodistributeurs. Par contre, Google et Facebook « ne paient pas non plus de taxes ni d’impôts, et pourtant, elles représentent désormais plus de 80 pour cent des publicités diffusées au Canada et récoltent plus de 70 pour cent des recettes. »

Si on tire des leçons de nos amis européens, les tentatives de « taxe Google », en France et en Belgique par exemple, n’ont pas fonctionné. En Europe comme partout dans le monde, les taxes ne sont pas uniformisées. Si la France impose trop fortement les GAFA, ces derniers installeront simplement leurs sièges sociaux chez leur voisin, la Suisse.

Cependant, la Grande-Bretagne a voté en 2015 une loi faisant en sorte que les impôts des multinationales passent de 20 à 25% si elles étaient prises à détourner des bénéfices afin d’alléger leur fardeau fiscal. Cette démarche a rapidement été surnommée « Google Tax », puisqu’en 2016 la multinationale a dû payer 168 millions d’euros en pénalité à la suite d’une enquête.

Un autre type d’intervention

Il existe une autre proposition pour aider les entreprises de presse à survivre à long terme, sans les toucher directement. Elle est proposée par de nombreux acteurs médiatiques, mais elle ne fait actuellement pas les manchettes : l’éducation aux médias.

Dans un rapport du Comité sénatorial permanent des transports et des communications, publié en 2006, on affirmait que « les nouvelles et l’information sont le plus utiles quand les consommateurs – c’est-à-dire les lecteurs, les auditeurs et les téléspectateurs – sont en mesure de distinguer un travail journalistique de qualité d’un travail médiocre, et sont conscients du rôle de l’information dans une démocratie qui fonctionne bien. »

Selon Dominique Payette en 2010, « toutes les autres commissions portant sur les questions d’information, de la commission Kent en 1980 au Rapport sur la qualité et la diversité de l’information en 2003, ont soutenu que l’éducation aux médias était une nécessité. »

Effectivement, la production de l’information d’intérêt public n’est pas l’équivalent du divertissement. Il est important que les citoyens, et en particulier les futurs citoyens, comprennent le rôle essentiel de l’information pour le maintien de notre démocratie et du développement de notre société. Ils doivent aussi comprendre la différence entre un blogueur et un journaliste, une opinion et un fait, une nouvelle et un éditorial. En somme, il faut les intéresser à ce qui est dans leur intérêt : l’information d’intérêt public.

C’est ce que font notamment les Belges. Leurs enseignants ont accès à un ensemble de ressources leur permettant d’intégrer l’éducation aux médias dans leurs cours, et toutes les écoles primaires et secondaires obtiennent gratuitement les journaux. Ils ont même mis sur pied en 2008 un Conseil supérieur de l’éducation aux médias pour promouvoir cet enseignement et étendre son champ d’application au-delà des écoles.

En Suède, déjà en 1979 le gouvernement a adopté une politique culturelle concernant spécifiquement les enfants. Ses principes veulent que tous les enfants suédois aient accès à l’ensemble des formes d’expression culturelle, en particulier les enfants défavorisés. Cela s’est traduit par d’importantes subventions pour le développement culturel des enfants, incluant des périodes d’activités libres et gratuites pour tous les enfants après les journées d’école.

Si on compare le Québec à la Suède, 77% de citoyens de ce dernier pays consultent les journaux imprimés sur une base quotidienne, alors qu’il faut étendre la période de lecture sur une semaine complète et inclure les journaux numériques pour que les trois quarts des Québécois aient lu un journal. Les Suédois sont aussi les premiers au classement de l’Organisation de coopération et de développement économique (OCDE) pour le niveau de littératie, alors que le Canada arrive entre le 5e et le 9e rang selon le type de texte. Et, sans établir de lien causal direct, alors qu’entre 2006 et 2009 le marché de la presse aux États-Unis a diminué de 30%, en Suède et en Finlande il n’a décru que de 4%.  Le rapport de l’OCDE suggère aussi que cette différence s’explique par la moindre dépendance des journaux européens aux revenus publicitaires.

Bien entendu, ce n’est pas avec une amélioration de notre programme d’éducation culturel et médiatique que nous allons sauver le monde journalistique demain matin, mais ce sera certainement utile à moyen et à long terme. Parce qu’il s’agit d’assurer la pérennité de notre vie civile, de notre démocratie. Il faut par la nature de la démocratie que le peuple soit informé afin de participer à la vie publique, ne serait-ce qu’en votant de façon éclairée.

Comme l’a écrit le Sénateur canadien Keith Davey dans un rapport de 1970 sur la concentration des médias, « Ce qui arrive à l’industrie du ketchup, des bardeaux ou d’un quelconque bidule nous touche en tant que consommateurs. Ce qui arrive à l’industrie de l’édition nous touche en tant que citoyens et citoyennes. »

Francis Boudreau
Département de philosophie

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