crédit photo: David Mendoza Hélaine

Le 20 avril dernier avait lieu au théâtre Maisonneuve une nouvelle représentation de la pièce « J’aime Hydro » de la comédienne Christine Beaulieu. Cette pièce-fleuve en cinq épisodes, théâtre-documentaire d’une durée de près de quatre heures, connaît un succès public et critique et a reçu le titre de Spectacle de l’année décerné par l’Association québécoise des critiques de théâtre ainsi que le prix Michel-Tremblay qui couronne le meilleur texte créé à la scène en 2016-2017. Et on comprend pourquoi.

crédit photo: David Mendoza Hélaine
Crédit photo: David Mendoza Hélaine, Théâtre Porte-Parole

En effet, la pièce nous happe du début à la fin avec un sujet dense. Les productions Porte-Parole, compagnie théâtrale axée sur l’engagement civique et la réflexion citoyenne, et plus particulièrement sa directrice artistique Anabelle Soutar, ont demandé à la comédienne de se pencher sur la relation qu’entretiennent les Québécois avec ce fleuron québécois qu’est Hydro-Québec.

Après de longues hésitations, Christine Beaulieu accepte ce défi immense. Il est fort intéressant de constater, dès le premier épisode, comment la conscientisation sociale s’immisce dans l’esprit de la citoyenne ordinaire, néophyte avouée dès le départ quant à tout enjeu en matière d’hydroélectricité. Elle nous expose sa démarche intuitive, pragmatique et nuancée à la fois pour en apprendre davantage sur Hydro-Québec et ultimement sur les enjeux énergétiques au Québec.

De lectures fastidieuses de mémoires à la participation à des consultations publiques, en passant par des rencontres avec divers intervenants un peu partout sur le territoire (sociologues, chercheurs, militants écologistes, représentants syndicaux, membres de la direction d’Hydro-Québec, citoyens-ennes de régions affectées par la construction de barrages, membres de communautés autochtones, représentants politiques dont le premier ministre du Québec, François Legault) et même par des visites de barrages hydro-électriques, Christine Beaulieu se questionne et nous incite à nous poser de délicates questions. À travers les exposés des intervenants rencontrés à qui Christine Beaulieu cède la parole, elle trouve des réponses contradictoires à travers lesquelles elle se forge ses propres constats.

Nous y apprenons avec étonnement que les barrages de la Romaine, dernier chantier majeur d’Hydro-Québec, servent surtout à produire de l’hydro-électricité pour des périodes de « fine pointe », c’est-à-dire de courtes périodes de temps où notre consommation énergétique dépasse les capacités de production d’Hydro-Québec. Que des mesures d’efficacité énergétiques, que Christine Beaulieu finit par être en mesure de chiffrer -contrairement au Premier Ministre Jacques Parizeau qui a soulevé la question du coût des mesures d’efficacité énergétique il y a plus de 20 ans sans obtenir de réponse – seraient moins coûteuses à mettre en place que de construire des barrages hydro-électriques.

Que les impacts économiques dans les régions concernées se font attendre, car ce sont des compagnies externes, soumissionnant à la moitié des évaluations d’Hydro-Québec, qui remportent les contrats au détriment des employés de la Côte-Nord, région qui suffoque économiquement, et au détriment des conditions de travail et de la sécurité des employés sur le terrain; les exemples sont percutants.

Qu’outre le harnachement de la Rivière Romaine, les impacts environnementaux du chantier de la Romaine sont importants; les exemples sont désolants. Qu’une des raisons principales du maintien de chantiers hydro-électriques, la rétention de l’expertise, repose sur des projections plus que fragiles.

Sans vouloir continuer de divulgâcher d’autres éléments-phares de la pièce, « J’aime Hydro » nous amène à revenir sur le « Maitre chez nous » associé avec cet audacieux projet de nationalisation de l’hydro-électricité au Québec. En 2019, sommes-nous toujours maîtres chez nous en matière d’hydro-électricité? Et qui est ce nous?  Par extension, et avec humour et auto-dérision, elle amène le public à se questionner sur ses valeurs environnementales et sa propre conscience écologique. On ne ressort pas de cette pièce indemne.

Il est possible d’écouter la retransmission audio en direct des représentations de J’aime Hydro (épisodes 1 à 5) pendant la tournée 2019. Je vous invite à le faire.

https://porteparole.org/fr/pieces/jaime-hydro

Ann Comtois
Département de psychologie
VP à l’information et à la mobilisation
Citoyenne plus informée

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